04. Et en suite ….

Et en suite ....


Dernière mise à jours 2024-04-12 par Mathilde Ohm
05. Quiproquo
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Une boîte contient 200 allumettes.
On les regroupe par paquets de la manière suivante :
on place une allumette puis on place trois allumettes,
puis 5, puis 7 et ainsi de suite.
À la fin il ne reste plus que 4 allumettes dans la boîte.

Combien y-a-t-il de « paquets » d’allumettes ?

Pour trouver le nombre de paquets de l’exercice concernant la boîte d’allumettes, je vais utiliser les méthodes apprises au collège :

  1. Comprendre les mots et l’énoncé ;
  2. Déterminer et nommer « x » ce que l’on cherche, l’inconnue  ;
  3. Écrire l’équation ;
  4. Relire l’énoncé ;
  5. Résoudre.

 

Pour la première étape, il me semble que le texte est clair. Ce n’est  ni  du chinois ni une langue ancienne.
Pour la deuxième, disons que x est le nombre de paquets.
Et maintenant ? Comment écrire une équation qui traduit  l’énoncé ?
Je me souviens du conseil de Monsieur Bozon en quatrième : Trouver le mot égale ou son synonyme dans l’énoncé !

Je relis : « Une boîte contient 200 allumettes » alors,  \underbrace{ 1 + 3 +  5 + 7+  \ldots }_{\textrm {x paquets }} remplient la boîte, non ?
Je relis encore : « …  À la fin il ne reste plus que 4 allumettes dans la boîte. » Ah ! Mais, j’ai oublié les quatre allumettes restantes.
Donc, je rectifie :   \underbrace{ 1 + 3 +  5 + 7+  \ldots }_{\textrm {x paquets }} + 4 remplissent la boîte. Il me semble que si je connaissais le nombre d’allumettes qu’il y a dans la boîte …
Je relis encore  une fois de plus : « Une boîte contient 200 allumettes »  Ah ! Oui. 200 !
Je n’aurais jamais imaginé que le verbe contient  puisse signifier égale.
Donc  \underbrace{ 1 + 3 +  5 + 7+  \ldots }_{\textrm {x paquets }} = 200 - 4 = 196.

Je pourrais additionner 1 + 3 +  5 + 7+... jusqu’à trouver 196, mais je crains que ce soit long et fastidieux ; et puis, si la boîte en comptait 10000 cela deviendrait irréalisable.   Je pourrais utiliser un tableur, mais ce n’est certainement pas l’outil que le prof attend pour cet exercice. Je décide donc de considérer ce travail comme une énigme à résoudre, une mini enquête policière.

Nous avons un avis de recherche pour un nombre de paquets. Les témoins sont : le total identifié par 200 et le reste 4. Faute d’avoir l’identité du suspect, nommons le n plutôt que x, parce que n est non seulement réel, mais il est aussi entier.  Et oui ! C’est l’usage.

Maintenant il nous faut utiliser ces nouveaux signes pour résoudre cette énigme :

Notre prof nous a appris à écrire les suites soit  par une expression explicite ou bien par une formule, dit de récurrence, qui indique comment trouver le successeur d’un terme : après U_3 vient U_4, le suivant de  « 5 » c’est « 7 ». Ce qui m’aide à discerner dans l’énoncé les mots significatifs de la suite numérique, de ses composants : indices \pmb{n}, terme \pmb{U_n}, raison \pmb{r}, terme initial \pmb{U_0} et définition explicite, c’est à dire  ce qui caractérise la suite numérique.

J’ai donc pensé  à partir de l’observation des premiers termes de la suite : \left\{\begin{array}{rcl} u_n &=& u_0 + n \times 2\\ \text{Avec} \quad u_0 &=& 1 \end{array}\right.

Appeler cette écriture « explicite » ! Il faut le faire ! Bon, d’accord, si on me dit quel est le rang n, je peux trouver l’élément, ou plutôt, sa valeur. Par exemple, si n=6 alors U_6 = 1 + 6 \times 2 = 13. Mais reste à comprendre, ou plus exactement à l’utiliser pour m’en servir. À quoi bon savoir si l’on ne peux rien faire et je voudrais bien que  ma matière grise, dans sa boîte en calcium, ne soit pas utile seulement pour penser, mais aussi pour agir.

Cette intrigue se déroule parmi les nombres impairs, c’est-à-dire le nombre pairs + 1.

Traduit  en langue mathématiques.

\underbrace{200}_{\textrm{total}}   = \underbrace{1 + 2 + 3 + ... U_n \qquad + 4 }_{\textrm{on vide la boîte}} avec \underbrace{ n \in \mathbb{N}}_{\textrm{Un nombre entier de paquets}} et \underbrace{U_n = 1 + n \times 2}_{\textrm{Une suite de nombres impairs}}.
 

Espérons faire mentir l’adage « traduttore, traditore »,  et ne pas trahir le texte avec cette traduction mot-à-mot. Et pourtant, malgré cette reconstitution, l’insaisissable fuyard n’est pas encore démasqué.

Interroger le témoin U_n, encore muet,   nous aiderait sans doute à identifier notre suspect. Malheureusement les deux compères U_n et n semblent complices U_n est lié à n puisque pour U_n peut nous livrer n qu’à la condition que  nous connaissions n. Je me sens dépaysée et confrontée à une langue dont le sens de certains mots ou expressions se dérobent.

Je décide de reprendre  mes notes de cours et je déniche une formule qui à un air de ressemblance avec cette fiction aux allumettes :

    \[\fbox{$U_0 + U_1 + \ldots + U_n = n \times \dfrac{U_0 + U_{n -1}}{2}$}\]

Il est bien difficile de se rendre sur le  terrain de la réalité puisque nous ne disposons que du texte et   aucun auteur à interroger.
Essayons de réaliser  par un dessin ; et puisque l’époque s’y prête, voyons un dessin animé : Si je mets côte à côte des petits tas d’allumettes comme dans ce récit, je vois que les petits tas augmentent de taille à raison de 2 allumettes supplémentaires à chaque paquet et que cela forme une sorte d’escalier, de triangle dont le nombre  d’allumettes qu’il contient est comme l’aire de ce triangle, c’est à dire la moitié de l’aire du rectangle qui à pour largeur le nombre de paquets n et pour longueur (hauteur)  le paquet U_n. Donc, puisque le nombre total d’allumettes dans les n paquets est : 200 -4 = 196 le double (c’est-à-dire l’aire du rectangle) est 2 \times 196 = 392
Il y aura donc n paquet de 1 + U_n colonnes.n   \left(1+(1+2 \times (n -1))\right) = 392

 

Ce qui saute aux yeux, c’est que maintenant plus rien ne fait obstacle, je  sais pouvoir répondre très prochainement. Je suis parvenue à résoudre une équation comme celle de l’année dernière  ne contenant qu’une inconnue (n) au moyen d’une  égalité.

n  \times \left(1 +\left(1 + 2 \times \left(n -1\right)\right)\right) = 392
n  \times \left(1 +\left(1 + 2 n - 2\right)\right) = 392
n  \times \left(2 n \right) = 392
2 n^2= 392

Et enfin  n  = \sqrt{\dfrac{392}{2}} = 14 Il y aurait donc 14 paquets totalisant 196 allumettes et 4 de reste pour remplir la boîte.

Vérifions :

14 \times \dfrac{1 + \overbrace{(1 + 2 \times ( 14 -1) ) }^{{U_n}}}{2} + 4 =  200

Monsieur Narthex examine mon travail avec attention. Puis, il me propose une rencontre avec le Sphinx de Gizeh. Le Sphinx est connu pour l’énigme qu’il posa à Œudipe, m’a-t-il dit : « Quelle est la bête à quatre pattes le matin, deux le midi et trois le soir ? » . Mais Œudipe, comme son nom l’indique en grec ancien Οἰδίπους/Oidípous, « celui qui a les pieds enflés » était en situation de répondre : « L’être humain » répondit Œudipe « puisqu’il finit sa vie avec une canne.» Tu vois, précise Monsieur Narthex, clarifier les idées avec des mots c’est utile. Œudipe a évité d’être jeté dans l’abîme parce qu’il trouve le bon mot. Tant qu’on pressant une idée, tant qu’elle reste sur le bout de langue, on ne peut pas s’en saisir, ni même la transmettre. C’est ce que dit le poème de Stefan George qui interroge sa muse pour qu’elle nomme l’idée prodigieuse qu’il a eue en songe. En vain, hélas. La muse ne parvient pas à trouver le mot juste. « Aucune chose ne soit, là où le mot faillit ».

Soit. La question se précise. Je vais chercher comment trouver les bons mots et énoncer les idées appropriées et surtout les méthodes pour les déceler. Mais ça, c’est une autre histoire.

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